Dans un jugement rendu le 21 mars 2017, le tribunal administratif de Versailles a rappelé les conditions d’engagement de la responsabilité des communes en matière d’incendie.
Le tribunal administratif de Versailles était saisi d’un recours indemnitaire tendant à voir condamnée une commune à réparer les préjudices résultant de l’aggravation des conséquences dommageables d’un incendie survenu dans une maison d’habitation située sur son territoire.
Plusieurs fondements de responsabilité étaient invoqués par les requérants :
- Responsabilité pour faute dans l’exercice des pouvoirs de police du maire, au regard de ses obligations en matière de déneigement d’une part, et en matière d’organisation de la lutte contre l’incendie d’autre part ;
- Responsabilité sans faute du fait d’un ouvrage public.
La décision commentée est particulièrement intéressante en ce qu’elle précise ce que recouvre chacune des obligations de police mises en cause.
Ainsi, en ce qui concerne l’obligation de déneigement des voies publiques, le tribunal rappelle qu’elle fait partie des missions de la police municipale au sens des dispositions de l’article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales qui prévoient que « la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : 1° Tout ce qui intéresse la sûreté et la commodité du passage dans les rues, quais, places et voies publiques, ce qui comprend le nettoiement […] ».
Le tribunal précise que les mesures que doit prendre le maire en vue d’assurer le déneigement dépendent de l’importance et de la nature de la circulation publique sur les voies ainsi que des fonctions de desserte sur celles-ci et que compte tenu de ces éléments, le maire peut, à condition de respecter le principe d’égalité des citoyens devant le service public, et sous le contrôle du juge administratif, ne pas procéder au déneigement d’une voie.
En l’espèce, le juge considère que l’absence de déneigement de l’une des voies menant au hameau dans lequel se situait la maison sinistrée ne saurait caractériser une faute dans l’exercice des pouvoirs de police du maire dès lors que l’accès à ce hameau pouvait se faire par une seconde voie qui avait fait l’objet d’opérations de salage et de déneigement, qu’eut égard à la configuration et à l’isolement des lieux les interventions des agents des services de la voirie étaient suffisantes et qu’en tout état de cause le délai au terme duquel les services de secours avaient pu accéder au lieu de l’incendie n’était pas anormal.
S’agissant de l’organisation de la lutte contre l’incendie, le tribunal rappelle qu’en application des dispositions combinées du code général des collectivités territoriales relatives aux pouvoirs de police du maire et aux services d’incendie et de secours, la responsabilité d’un service départemental d’incendie et de secours n’est susceptible d’être engagée que dans l’hypothèse d’une faute commise par ce service dans l’organisation du service ou dans la gestion des moyens humains ou matériels mis en œuvre pour lutter contre l’incendie. Il précise que la responsabilité de la commune demeure toutefois susceptible d’être engagée lorsque les dommages trouvent en tout ou partie leur origine dans une faute commise par les autorités de police communales dans l’exercice de leurs attributions.
En l’espèce, la formation de jugement exclut que la durée d’extinction de l’incendie et l’absence de bouche à incendie puissent caractériser des fautes du maire dans l’exercice de ses attributions de police. Elle retient que la durée d’arrivée des services de secours sur les lieux n’était pas anormale compte tenu des conditions météorologiques particulières, que la durée totale d’extinction du sinistre à partir de l’appel téléphonique était inférieure à la durée approximative d’extinction d’un sinistre moyen évoquée par la circulaire interministérielle du 10 décembre 1951, que ce texte, qui n’a aucun caractère réglementaire, n’impose pas la présence systématique de borne à incendie à une distance particulière mais définit, de manière globale, les capacités minimales permettant de satisfaire les besoins en matière de lutte contre l’incendie pour les trois dispositifs que constituent un réseau de distribution d’eau, des points d’eau naturels ou des réserves d’eau artificielles, que la quantité d’eau puisée dans la mare pour procéder aux opérations d’extinction n’a pas été insuffisante, que les services de secours n’ont rencontré aucune difficulté s’agissant de la quantité d’eau, que la circonstance que la commune ait, par la suite, installé une borne incendie à proximité du lieu du sinistre ne saurait caractériser une quelconque faute à sa charge en l’absence de toute norme obligatoire en ce sens dès lors qu’il existait un point d’eau à proximité et que le durée d’extinction du sinistre a été d’environ 1h15 et que l’absence de bouche incendie n’a donc entraîné aucun retard dans l’intervention des pompiers.
La motivation de la décision révèle que, dans la recherche d’une éventuelle faute dans l’organisation de la lutte contre l’incendie, le juge apprécie les conditions de l’intervention des services de lutte contre l’incendie au regard des circonstances particulières de l’espèce, notamment des conditions climatiques.
Enfin, le tribunal exclut que la responsabilité de la commune puisse être engagée sans faute du fait de l’état de la voie d’accès au hameau qui n’avait pas été déneigée en l’absence de lien de causalité. Il estime que l’état des voies publiques n’est pas à l’origine de l’aggravation du sinistre dès lors que l’accès au hameau était assuré par une autre voie qui avait fait l’objet d’opérations de déneigement et permis aux services de lutte contre l’incendie d’atteindre le lieu du sinistre et de procéder aux opérations d’extinction dans un délai raisonnable compte tenu des conditions météorologiques.